lundi 13 juillet 2015

Salle de shoot

La même substance peut être poison ou médicament, source de plaisir ou de souffrance. Pourtant au vu de la loi les utilisateurs de drogues sont traités comme des malades ou comme des délinquants. Petite histoire de la consommation de drogues et du traitement des  usagers d'opiacés.

Depuis 1916 seul l’usage de stupéfiants en société était pénalisé mais l’usage solitaire ou privé n’était pas condamné .

1970 fut l’année de la création du délit d’usage de stupéfiant (L628). Cette loi est avant tout destinée à lutter contre la « déchéance morale », « la société de tolérance qui empoisonne la jeunesse ». Faisant suite aux évènements de 68 La loi de 70 s’est donné pour but de restaurer l’autorité des adultes. La loi de 1970 a vendu la question des drogues comme opposant le bien et le mal, la décadence morale à l’ordre social. Son but est de compliquer à l’extrême la vie des consommateurs de stupéfiants pour les pousser à suivre un traitement médical. L’usager doit être mis dans l’inconfort et le malheur, afin de devenir demandeur de soins et de repentance. L’image répulsive des drogues implique la stigmatisation et l’exclusion de leurs usagers. Cet effet répulsif –dont l’efficacité est relative si on considère l’augmentation continue de la croissance de masse dans le monde – n’est rien d’autre que la méthode moyenâgeuse de mise au pilori : il faut laisser ces parias, les usagers de drogue dure, consommer et mourir dans des conditions indignes, pour qu’ils restent un repoussoir pour la société.


1980 La grande peste du SIDA fait des ravages parmi utilisateurs de drogues injectables. Aujourd'hui l’injustice du sida liée à la connerie de la  politique de la stigmatisation des drogues me fait honte d’avoir eu honte de ces années d’injection.

1987 Autorisation de vente libre des seringues. Les opposants à la libération des seringues sont nombreux : la majorité des professionnels de santé, les pharmaciens, l’IGAS (inspection Générale des Affaires Sociales), la commission des stupéfiants… Tous luttent pied à pied pour une « vraie » prise en charge des usagers (le sevrage) et considèrent que toute libéralisation constitue un pas vers une dangereuse légalisation, ou une incitation à l’usage.
En l’absence de traitements de substitution aux opiacés (TSO), les usagers utilisent des produits codeïnés vendus sans ordonnance [le corps métabolise la codéïne en morphine]. Ainsi la vente du Néo-Codion a explosé dans les années 90. Huit millions en 1990 , douze millions en 1994 , dont 80% utilisés en auto-substitution.

1995 généralisation des traitements de substitution. (Methadone, Subutex). Le Subutex (buprénorphine haut dosage) peut être prescrit dans le cadre de la médecine libérale, mais ne fait pas l’objet de préparation injectable en France. La buprénorphine n’est pas classée comme stupéfiant (malgré la fatwa prononcée à son encontre par l’OICS – Organisation Internationale de Contrôle des Stupéfiants - ).

2002 Nicolas Sarkozy, ministre de l’intérieur déclare : « rien ne sera toléré […]. Il n’y a pas de petite consommation personnelle, il n’y a pas d’expérience individuelle, il n’y a pas de jeunes libres et branchés. »

2004 Institutionnalisation de la réduction des risques. Depuis le débat national sur les salles de consommation continue d’exacerber les tensions entre les tenants de la guerre à la drogue et les partisans de la réduction des risques.

2016
la premières salle de shoot ouvre à Paris le 14 octobre http://www.europe1.fr/societe/la-1ere-salle-de-shoot-va-ouvrir-mardi-a-paris-2868958#xtor=CS1-15


Sources : Salles de shoot. Editions de la Découverte.

Auteurs : Pierre Chappard a présidé Act Up-Paris de 2009 à 2011. Il est actuellement président de PsychoACTIF et coordinateur du Réseau français de réduction des risques.
Jean-Pierre Couteron est psychologue clinicien et président de la Fédération Addiction
http://www.editionsladecouverte.fr/catalogue/index-Salle_de_shoot-9782359250688.html
http://www.rvh-synergie.org/ressources-et-informations-pratiques/methadone-centres-de-prescription-en-france.html
http://www.federationaddiction.fr/la-federation/nos-partenaires/reseau-francais-de-reduction-des-risques/
Un bon site sur les opiacés (en anglais) http://factsanddetails.com/world/cat54/sub348/item1218.html

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