mercredi 1 octobre 2014

Narcissisme de masse 1

Narcisse. Caravage.
Quand elle m'a mis "sur la touche" professionnellement et socialement, l'hépatite m'a montré que ma vie ne consistait pas seulement à faire ce que l'on attend de moi. Mais le moi en lui même n'est il pas également haïssable ?  

Réflexion donc à propos du narcissisme, cette pathologie de la personnalité  vieille comme le monde, qui comme que le montrent selfies et réseaux sociaux se développe particulièrement  dans notre société. Ainsi, ce sur-développement du moi est il propre à notre nature ou bien peut on parler de narcissisme de masse ?

En 1979, Christopher Lasch, sociologue américain expose dans son ouvrage 'la culture du narcissisme' comment selon lui, la société capitaliste américaine produit des individus à tendance narcissique, et comment le narcissisme semble représenter la meilleure manière d'endurer les tensions et les anxiétés de la vie moderne.
Notre société est brutale, elle n’apparaît pas comme un système harmonieux et bienveillant mais plutôt comme un univers de conflits avec des perdants, des gagnants ,des dominants et des dominés. Nous nous sentons tout petits face aux gigantesques problèmes du monde actuel et nous ne voyons pas comment changer quoi que ce soit. Devant la perte de tout espoir de changer notre société ou même de la comprendre, nous cherchons plutôt des moyens de l'éviter . Nous nous intéressons alors à des stratégies de survie, à des programmes qui nous garantissent bonne santé (notre capital santé), paix de l'esprit (l'épanouissement personnel comme performance à accomplir) et nous nous rêvons être de grands sages apaisés au milieu du tumulte social. 
Face à tant de constats d'impuissance, autant se divertir, penser à soi aux siens et consommer. Autant vivre pour soi les instants qui nous restent. 
Narcisse se replie alors sur le présent, son passé l’intéresse peu et il évite de penser à l'avenir.
Narcisse est le candidat idéal aux fantasmes de vitesse, de puissance, de pouvoir et de beauté. Mais dans le même temps il a conscience que ses appétits le rongent, qu'ils sont source de son insatisfaction permanente. Au fond de lui il voudrait trouver une certaine quiétude, un repos.
Alors Narcisse se réfugie dans le détachement critique et la distanciation ironique.Il donne ainsi aux autres et à lui même en, démythifiant, l'impression de sublimer la réalité, même quand il s'y plie et fait ce qu'on attend de lui. L'humour agit moins "pour prendre quelque distance par rapport à ses angoisses que pour s'insinuer dans les bonnes grâces de son auditoire". Facebook est à ce titre une remarquable caisse de résonance. Ainsi, à grands coups de mensonge, de cynisme, de divertissements, de négation et d'indifférence, Narcisse tente de s'accommoder et de s'arranger de la réalité sociale qui l'entoure.
Puisque la société n'a pas d'avenir il est normal de vivre dans l'instant présent, de fixer notre attention sur notre propre représentation privée (privée de sens) et de cultiver un intérêt transcendantal pour nous même tout en devenant des connaisseurs avertis de notre propre décadence. 
"Assailli par l'anxiété, la dépression, un mécontentement vague et un sentiment de vide intérieur, l'homme psychologique du XXIème siècle ne cherche vraiment ni son propre développement ni une transcendance spirituelle, mais la paix de l'esprit.../...Il lui reste à se tourner vers les thérapeutes dans l'espoir de parvenir à cet équivalent moderne du salut : "La santé mentale".'
'Ce n'est pas par complaisance, mais par désespoir que les gens s'absorbent en eux-mêmes .../...L'effondrement de la vie personnelle ne provient pas de tourments spirituels réservés aux riches, mais de la guerre de tous contre tous. .../... Ainsi le narcissisme est plus une défense contre les pulsions agressives de la société que l'amour de soi'.
Pour se reconstruire, on se replie sur soi.
Ozias





Narcissisme : 'Au sens clinique, le narcissisme est une pathologie de la personnalité. L’individu qui en souffre a sans cesse besoin d’attirer l’attention sur lui non par satisfaction mais par manque. Il se montre étouffant pour les autres, dont il ne sait pas prendre en compte les désirs, du fait de son manque d’empathie. C’est pourquoi, il ne cherche dans la relation à autrui que sa satisfaction. Il a tendance à se comporter en parasite de son entourage ; il vampirise leur énergie, leur bonne volonté, tout leur temps parce qu’il est foncièrement incapable de se supporter. Il veut les placer sous sa dépendance et se donner le sentiment de les dominer, afin de compenser ses propres carences en terme d’estime de soi'.

Pour aller plus loin, deux liens recommandés :
http://www.actu-philosophia.com/spip.php?article382
http://tractacus.free.fr/autres/narcisse.pdf

Crédits : 'La culture du narcissisme". http://www.les-renseignements-genereux.org/
Les citations en italique sont de Christopher Lasch.

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